Au lendemain de l’apparition de la Covid-19 en Chine, les réseaux sociaux numériques, découvrent une maladie méconnue du cyberespace ivoirien : le coronavirus. Ce virus connaîtra une ascension virale auprès des communautés virtuelles Facebook en Côte d’Ivoire, alimentées par des sujets à polémiques dont les infox. En contexte de riposte au SARS-CoV-2, ces publications préoccupent une équipe de recherche du projet APHRO-CoV, qui les analyse sous l’angle de la recherche qualitative, au moyen de la netnographie.
Des contenus drôles, des discussions enflammées…les communautés Facebook entre infox et messages de santé publique
Ruée vers les feuilles du neem, la mangue ou les médicaments néo-traditionnels, réinterprétation des gestes barrières, opposition et défiance des mesures de ripostes sanitaires, théories complotistes : de nombreux sujets à polémiques, des plus drôles aux plus enflammés circulent et animent les communautés Facebook depuis l’apparition de l’épidémie. Ils font l’objet d’un travail de recherche au sein du projet APHRO-CoV.Une étude dans l’air du temps
L’objectif de cette recherche en sciences sociales est de décrire et analyser de manière fine les sujets à polémiques - dont les infox circulant sur le cyberespace ivoirien (en particulier Facebook) – avec un focus spécifique sur celles concernant l’origine de la maladie, le dépistage, les centres de santé et les traitements perçus comme préventifs et curatifs dans le contexte de riposte à la Covid-19. Cette recherche vise à accompagner et à guider les réponses des décideurs, notamment en termes de communication auprès des populations.La pratique de la recherche auprès des e-communautés
Aux interrogations suscitées par cette étude, la netnographie s’offre comme approche méthodologique dans l’art de pratiquer la recherche qualitative. Cette démarche qui se focalise sur les communautés virtuelles, duplique les approches classiques de l’ethnographie.Concrètement elle a débuté par une pré-sélection d’une vingtaine de groupes et pages Facebook. A la suite d’une immersion à l’aide d’un avatar, 14 groupes Facebook publics et 3 pages hétérogènes ont été retenus. Débutée le 13 juillet 2020, l’étude fait une analyse rétrospective (entre le 11 mars et le 13 juillet 2020) des infox et sujets à polémiques recensés auprès des communautés virtuelles Facebook. Afin de sélectionner des données pertinentes dans le cadre de cette recherche, à l’aide d’une revue de presse du cyberespace ivoirien, les moteurs de recherches des communautés virtuelles Facebook ont été interrogés, et ont généré des publications (commentaires y compris) sauvegardées pour cette analyse rétrospective. Du 14 juillet au 30 novembre 2020, une veille quotidienne des communautés virtuelles sélectionnées est réalisée, et permet de recueillir les infox et sujets à polémiques circulant sur ce réseau social numérique.
Afin d’examiner en profondeur les données de la netnographie, des entretiens complémentaires seront conduits auprès de plusieurs catégories d’acteurs : administrateurs des groupes Facebook sélectionnées, cyberactivistes et professionnels des médias spécialisés en fact checking. Ces entretiens seront retranscrits, anonymisés puis codés à l’aide du logiciel NVivo. Débutée le 27 octobre, la phase d’entretiens complémentaires prendra fin le 31 décembre 2020.
Résultats de l'étude
Les résultats seront diffusés au fur et à mesure lors de webinaires organisés dans le cadre du projet APHRO-CoV, à destination des équipes opérationnelles (CROUS/COUS, personnel de santé, personnel institutionnel) de cinq pays de la sous-région (Mali, Sénégal, Côte d’Ivoire, Burkina Faso et Gabon), afin d’aider à l’amélioration de la prise en charge. Aussi, des notes de politiques et un article scientifique seront publiés à la fin de l’étude.
Note à l’intention des cyberactivistes, professionnels des médias et des réseaux sociaux Dans le cadre de cette étude, un volet empirique accompagnera la collecte de données du cyberespace ivoirien, pour cela, l’assistant de recherche qualitative Djaha Joël Fabrice Konan contactera des acteurs des communautés Facebook. Son approche contribue à la réalisation de la seconde phase de l’étude. Il s’agira essentiellement de conduire des entretiens auprès des administrateurs de groupes, cyberactivistes et professionnels des médias. Ces entretiens individuels approfondis viendront compléter les données issues de la netnographie. Ils auront pour objectif d’approfondir la compréhension des positionnements, de comprendre les intentions et les motivations ainsi que de faire un retour sur leur trajectoire individuelle en tant que "cyberactiviste". Vous pourrez proposer un canal de préférence dans le cadre de la réalisation de votre entretien. Qu’il s’agisse de messageries cryptées (Signal, Télégram, WhatsApp, Messenger), d’appel téléphonique ou d’entretien en situation (face-à-face), le canal favorisera une expression anonyme et vous permettra de vous exprimer librement. Si cela vous intéresse, le lien de contact apparait en bas de cet article |
Une équipe de recherche multidisciplinaire
Ce projet de recherche s’inscrit dans le projet APHRO-CoV, financé par l’AFD et piloté par l’INSERM - REACTing dans le cadre de la réponse à la crise du Coronavirus, en collaboration avec le Programme de Recherche sur le VIH/Sida et maladies associées de Côte d’Ivoire (PAC-CI), basé au CHU de Treichville.L’équipe de recherche est composée de chercheur.e.s d’institutions partenaires du Sud et du Nord.
- Chargé d'étude : Joël Fabrice Djaha, Doctorant en sociologie, Université Félix Houphouët-Boigny, Côte d'Ivoire
- Superviseure : Anne Bekelynck, Sociologue - monitrice des études de sciences sociales, Programme PAC-CI, site ANRS de Côte d'Ivoire
- Abo Yao, Epidémiologiste - chargé de projet APHRO-CoV (PAC-CI), Programme PAC-CI, Site ANRS de Côte d’Ivoire.
- Moh Raoul, Programme PAC-CI, Site ANRS de Côte d’Ivoire.
- Joseph Larmarange, Démographe, CEPED, IRD, France.
- Mathias Altman, Épidémiologiste, ISPED, France
- Arlette Simo Fotso, Démographe, CEPED, IRD, France.
- Louis Valantin, ISPED, France.
- Zélie Godin, chargée du projet APHRO-CoV - Reacting/Inserm, France